Lorsque la Seine débordante
Un beau matin quitta son lit
Elle alla au Jardin des Plantes
Les fauves en furent tout surpris
Ce fut parmi eux
Un vrai "fauve-qui-peut"
Les lions s'agitant dans leur cage
Rugissaient pleins d'indignation
"Dire qu'on n'a même pas un garage
Quand en face c'est la gare des Lyon"
Les pauvres ours, comme l'on pense
Dans leur bain de siège tout trempés
Pensaient "Notre fosse manque d'aisance
Va falloir nous carapater
Et chercher en chœur
Une foss'...oyeur"
Les serpents dans leur maisonnette
Agitaient sans interruption
Avec désespoir leur sonnette
Comme à la Chambre monsieur Brisson
Plus loin on entendait les plaintes
Des zèbres qui trempant dans l'eau
Voyaient toutes leurs couleurs déteintes
Y avait plus une raie sur leur dos
I' s' plaignaient entre eux
En langage zébreux
Un éléphant d'un air très grave
Offrit sa trompe à son gardien
Pour lui pomper l'eau dans sa cave
Mais i' s' trompa et pompa l' vin
Les crocodiles versant des larmes
Augmentaient le niveau de l'eau
Mais les phoques crièrent pleins d'alarmes
"Si vous pleurez comme des veaux
On n' verra ici jamais l'eau... tarie"
Les canards dirent "Faut qu'on s' cavale"
Et prenant leur cane à la main
Ils s 'dirigèrent en file spéciale
Vers la rédaction du Matin
L'hippopotame eut une joie vive
Car il se trouva transporté
En s'en allant à la dérive
Jusqu'au faubourg Saint-Honoré
D'une chic maison
Il tira l' cordon
Comme c'était la d'meure de Fallières
Le concierge, myope, dit-on
Salua c't animal jusqu'à terre
En croyant qu' c'était son patron
Bref, la Société Protectrice
Mit les animaux rescapés
Dans un vaste local propice
Que sans doute vous devinez
Ils sont pour l'hiver
Logés à Chantecler
Pour les voir au Jardin des Plantes
Autrefois ça ne coûtait rien
Aujourd'hui Rostand fait des rentes
En les faisant voir chez Coquelin