Paroles de Desorgues :
Père de l'Univers, suprême
intelligence
Bienfaiteur ignoré des aveugles
mortels
Tu révélas ton être
à la reconnaissance
Qui seule éleva les autels.
Ton temple est sur les monts, dans les
airs, sur les ondes
Tu n'a point de passé, tu n'as
point d'avenir
Et sans les occuper, tu remplis tous
les mondes
Qui ne peuvent te contenir
Tout émane de toi, grande et
première cause
Tout s'épure aux rayons de ta
divinité
Sur ton culte immortel, la morale repose
Et sur les moeurs, la liberté.
Pour venger leur outrage et la gloire
offensée
L'auguste liberté, ce fléau
des pervers
Sortit au même instant de la
vaste pensée
Avec le plan de l'univers.
Dieu puissant ! elle seule a vengé
ton injure
De ton culte elle-même instruisant
les mortels
Leva le voile épais qui couvrait
la nature
Et vint absoudre tes autels.
O toi ! qui du néant ainsi qu'un
étincelle
Fis jaillir dans les airs
L'astre éclatant du jour
Fais plus... verse en nos coeurs ta
sagesse
Embrasse nous de ton amour.
De la haine des Rois, anime la Patrie
Chasse les vains désirs, l'injuste
orgueil des rangs
Le luxe corrupteur la basse flatterie
Plus fatale que les tyrans.
Dissipe nos erreurs, rends nous bons,
rends nous justes
Règne, règne au delà
de toute illimité
Enchante la nature à tes décrets
augustes
Laisse à l'homme sa liberté.
Paroles de Desaugiers :
Principe créateur, pure et sublime essence,
Qui du monde et des tems régla l'ordre éternel,
Un peuple souverain, digne de sa puissance,
T'honore en ce jour solennel.
Porte un regard d'amour sur ce spectacle auguste
Tout plein de ta grandeur, de ta divinité !
Les parfums de la terre et les vœux d'un cœur juste
Sont l'encens qui t'est présenté.
Que, versant dans les airs une clarté nouvelle,
L'astre brillant du jour, dans sa course entraîné,
Ne puisse contempler une pompe plus belle,
Un empire plus fortuné !
À ce feu révéré par le Guèbre et le Mage,
L'erreur dans l'Orient éleva des autels ;
À des dieux imposteurs elle offrit un hommage
Souillé par le sang des mortels.
L'impie audacieux, levant sa tête altière,
S'écriait : « Tu n'es pas le père des humains ;
Tu n'as point fait les cieux ; ce globe de lumière
N'est point une œuvre de tes mains.
La matière éternelle à tout donna naissance ;
Mortel faible et trompé, rougis, ouvre les yeux :
Tout périt sans retour, le crime et l'innocence ;
C'est la crainte qui fit les dieux. »
C'est ainsi qu'étouffant une voix importune,
De son cœur sur nos maux il répandait le fiel ;
Barbare, il aigrissait les pleurs de l'infortune,
Levant ses regards vers le Ciel !
La Raison, éveillée au cri de la Nature,
Du trône de l'orgueil précipite les rois,
Et des prêtres menteurs éclairant l'imposture,
Rétablit ton culte et nos droits.
L'athéisme, frappé par nos lois salutaires,
Exhale ses poisons et se roule abattu ;
Les cieux s'ouvrent au juste, et ce peuple de frères
Pour culte embrasse la vertu.
Toi, le conservateur des êtres et du monde,
Si ton souffle a donné la forme aux élémens,
S'il soutient des états la puissance féconde,
Ou renverse leurs fondemens,
D'une postérité florissante et nombreuse,
Flatte l'espoir jaloux d'un peuple énorgueilli ;
Et que de nos succès, par une race heureuse,
Le fruit soit long-tems recueilli.
Déjà la mer voit fuir le perfide insulaire ;
L'aigle altier des Césars recule ensanglanté ;
Les monts sont affranchis, et du farouche Ibère
L'orgueil indocile est dompté.
La vertu, la pudeur trop longtemps profanées,
Sans crainte à nos regards lèvent un front serein,
Et la fécondité, de gerbes couronnées,
Verse les trésors de son sein.
Ô Dieu de l'univers ! Dispense à la patrie
Les dons de la Nature et de la Liberté,
Un repos glorieux, une active industrie,
Une longue prospérité.